APS - ALGÉRIE

dimanche 31 mars 2019

Le peuple veut un changement radical, maintenant


Comme il fallait s’y attendre, l’application de l’article 102 invoquée, le 26 mars 2019 par le chef d’état-major, le général Gaïd Salah, n’a pas suscité l’engouement escompté ni auprès du peuple, ni auprès de la classe politique car elle arrive trop tard. Elle aurait pu être applaudie si elle avait été préconisée au plus tard en janvier 2019.
En effet, depuis que le peuple s’est ébranlé le 22 février 2019 pour reconquérir sa souveraineté spoliée, l’option préconisée est perçue par les citoyens comme une manœuvre dolosive visant à dévoyer la révolution en cours.

La réaction des citoyens est légitime car l’application de l’article 102 émanait en plus de quelqu’un qui s’entêtait bêtement à soutenir Bouteflika. L’attitude ambivalente de Gaïd Salah, partisan zélé du président malade, avait érodé la confiance dont bénéficiait l’armée qui n’a pas su anticiper le choix du peuple. L’immense majorité, pour ne pas dire toute l’ANP, abhorrait le régime de Bouteflika, mais pour éviter la mutinerie, elle était obligée de subir l’égarement de son chef d’état-major qui a manqué de courage.
L’ANP, «armée du peuple avec le peuple», peut encore se rattraper rapidement si elle procède à la destitution immédiate du président et la mise en œuvre d’une transition citoyenne incarnée par des personnalités qui ne se sont jamais fourvoyées. Le peuple lui redonnera sa caution pour peu qu’elle accélère le dégagement des prédateurs qui soutenaient la prolongation de l’autocratie bouteflikienne. L’ANP dispose de l’autorité légale pour les arrêter et mettre sous séquestre leurs biens jusqu’au dénouement de la crise institutionnelle.
Le peuple s’est exprimé par référendum avec 35 millions de participants pour exiger le démantèlement du régime. L’ANP a le devoir de le faire maintenant et non demain. L’armée ne peut pas se dérober à sa responsabilité historique. Elle a l’opportunité de rétablir la confiance corrodée par le préjudiciable égarement de l’octogénaire général Gaïd Salah qui doit lui aussi dégager, mais qu’il destitue d’abord le président et ses sbires.
La révolution citoyenne qui s’installe dans la durée revendique en effet un processus de transition citoyenne supervisé par l’armée, seule institution encore fiable et viable. Elle prône l’avènement d’une IIe République par la refondation de l’Etat national et la neutralisation des prédateurs du régime.
Mode opératoire de la transition :
pour une transition en deux phases, le chef d’état-major doit exiger du président qu’il signe des décrets pour :
– nommer un gouvernement de transition de 17 ministres technocrates non affiliés au régime ;
– désigner un Comité d’Etat de trois (03) hauts responsables, réputés intègres, pour assumer la fonction de chef d’Etat (Direction collégiale) ;
– dissoudre le Conseil constitutionnel ; l’APN et le Conseil de la Nation ;
– créer une Commission pluridisciplinaire de 102 membres, chargée d’élaborer la nouvelle Constitution ;
A l’issue, le président devra démissionner automatiquement et remettre le pouvoir au Comité d’Etat qui aura à :
– gérer le gouvernement transitoire et légiférer par ordonnance ;
– créer une Commission électorale indépendante représentative ;
– superviser les travaux de la commission pluridisciplinaire qui devra rendre ses conclusions dans un délai n’excédant pas trois (03) mois ;
– organiser un référendum pour l’adoption de la nouvelle Constitution ;
– organiser une élection présidentielle dans un délai de cinq (5) mois.
La première phase doit se réaliser sous l’égide du président actuel sous le contrôle de l’ANP pour éviter au pays un dangereux vide institutionnel qui compromettrait la dynamique pacifique impulsée par le peuple. Il faut bannir des esprits tout basculement dans un Etat d’exception.
La deuxième phase doit se réaliser sous l’égide du Comité d’Etat dont la mission s’achèvera obligatoirement après l’élection du nouveau président de la République qui aura la tâche de mettre en œuvre la refondation de l’Etat algérien qui incarnera la IIe République.
Tous les citoyens doivent faire preuve de prudence et de clairvoyance pour comprendre toute l’importance et la sensibilité de la situation inédite que nous vivons. Le processus de changement est déclenché, les manifestations de rues l’entretiennent, mais pour le rendre irréversible, il faut combattre la contre-révolution des prédateurs.
Dès lors que le peuple s’est exprimé aussi vigoureusement, il est impératif d’interpeller les auteurs du désastre : Saïd Bouteflika, Ahmed Ouyahia, Abdelmalek Sellal, Abdelmadjid Sidi Saïd, Ali Haddad, les frères Kouninef, Ramtane Lamamra, Abdelkader Hadjar, Djamel Ould Abbès, Tayeb Louh, Tayeb Belaïz, Noureddine Bedoui et Abdelghani Zaalane. Les arguments juridiques à caractère pénal justifiant leur interpellation sont nombreux et aucun chantre des droits de l’homme ne pourrait les soustraire à la justice.
Ainsi, le processus approuvé par le peuple se consoliderait et éviterait des dérapages que ces symboles maléfiques ne manqueraient pas de provoquer, surtout qu’ils disposent d’argent et d’accointances à l’intérieur et à l’extérieur (Abou Dhabi, Riyad, Paris, Bruxelles, Genève). Ils peuvent fomenter des coups bas pour dévoyer notre révolution citoyenne. Ils initient déjà des manœuvres troubles pour renaître et leur refus d’obtempérer en est une.
Nous faisons face à des forces maléfiques qui n’hésiteraient pas à précipiter l’Algérie vers l’abîme. Le peuple doit acculer l’ANP à réagir vite avant qu’il ne soit trop tard. La crise institutionnelle est grave. La situation est très tendue et tout peut basculer vers l’inconnu à n’importe quel moment. Le salut viendra de la résilience des citoyens et de détermination de l’ANP.

Par Belaïd Benamar , Analyste IN elwatan

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