APS - ALGÉRIE

lundi 28 mars 2016

22 mars 2016 à Bruxelles 22 mars 1993 à Alger

Par Leïla Aslaoui-Hemmadi
Après Tunis, Paris, Abidjan, les terroristes islamistes ont à nouveau frappé à Bruxelles le 22 mars 2016. Et lorsque la barbarie islamiste frappe quelque part en Europe ou ailleurs, des images que nous pensions enfouies, oubliées ressurgissent de nos mémoires. Corps déchiquetés, carbonisés, difficilement identifiables suite à l’attentat à la bombe ciblant l’aéroport d’Alger en 1992, carnage du boulevard Amirouche le 30 janvier 1995 ; attentat à la bombe contre le siège de la DGSN (Sûreté nationale août 1995). 

Longue liste des victimes décédées. Longue liste des rescapés handicapés à vie... Et ce n’est là qu’un mince aperçu d’un listing autrement plus long, auquel il faut adjoindre celui des assassinats des journalistes (122), des intellectuels, des médecins, dentistes, des femmes, des enfants, des bébés, des combattants de la guerre de Libération, qui s’engagèrent comme «Patriotes» pour combattre le terrorisme islamiste aux côtés des forces de sécurité. Comment, dès lors, avec toutes ces plaies non encore cicatrisées, — si tant est qu’elles puissent l’être un jour — ne pas être solidaire avec les familles des victimes décédées ou blessées lors de ces attentats ? Comment ne pas compatir à leur douleur ? Une douleur que nous connaissons, ressentons, partageons pour l’avoir vécue. Et ce, durant de longues années.
Pour autant, l’on ne peut empêcher l’image du terrible mur d’incompréhension du monde entier, resurgir elle aussi de nos mémoires. Un monde qui tantôt se délectait de nos malheurs via les chaînes de télévision occidentales et arabes, tantôt invitait sur ses plateaux télévisés les pseudo-«experts», qui avaient déserté les rangs de l’ANP ou les islamistes réfugiés dans une des capitales occidentales. «Pays à feu à sang», «pays dans le chaos», «guerre civile», «violence des deux côtés», «éradicateurs», «qui tue qui ?», furent les seules marques de compassion auxquelles nous eûmes droit. Nous apprîmes alors à combattre la bête immonde seuls et à enterrer nos morts seuls. Le 22 mars 2016 évoque pour moi le 22 mars 1993.
Trois hommes d’une valeur inestimable que l’Algérie ne remplacera jamais viennent de tomber sous les balles des islamistes. Hafid Sinhadri, Djillali Liabès et Laâdi Flici ont été assassinés entre le 14 et le 17 mars 1993. Aucune réaction dans le monde.
Le 22 mars 1993 sous un beau soleil algérois une immense marche regroupant des milliers de personnes a lieu pour dire notre colère, mais surtout notre résistance et faire le serment que notre pays ne sombrera pas dans le chaos, comme prédit, voire souhaité par des journalistes occidentaux bien connus qui ne vinrent jamais en Algérie durant les années rouges. Ce jour du 22 mars 1993 pas un seul pays du monde n’a dit : «Je suis Liabès», «je suis Sinhadri», «je suis Flici». Syndicalistes, combattants de la guerre de Libération, leaders des partis politiques démocrates, journalistes, médecins, intellectuels, femmes — beaucoup de femmes — se tenaient par la main ce jour du 22 mars 1993.
A visage découvert, nous marchions, à visage découvert nous exprimions notre colère à haute et intelligible voix, en sachant que le tour de l’un ou de l’autre viendrait. Et lorsqu’il vint, pour beaucoup d’entre nous, nous nous heurtâmes au même silence du monde entier. Aucune manifestation, aucune banderole pour dire : «Je suis Bentalha», «je suis Boucebci», «je suis Fatima-Zohra Ouraïs», «je suis la Maison de la presse» (après l’horrible attentat à la bombe en 1996 où trois journalistes du Soir d’Algérie furent assassinés). Ou encore «je suis le père Claverie» (assassiné à Oran en 1996) «Je suis les moines de Tibhirine» (assassinés en mai 1996). Au lieu de cela, la «solidarité» et la «compassion» de journalistes occidentaux bien connus auxquels il faut adjoindre les «humanistes» prirent le nom de «Qui-tu-qui ?».
Ainsi, en sus de subir au quotidien, de jour comme de nuit, la terreur islamiste, nous étions «sommés» de nous «expliquer». Ou plutôt pour plaire à ce lobby et bénéficier de tickets de restaurant ou d’une carte de séjour, il nous fallait absoudre les islamistes et renvoyer au banc des accusés les forces de sécurité. Pourtant, nous fûmes nombreux, femmes et hommes civils, invités par des associations à nous déplacer en Europe, aux USA pour dire ce qui se passait réellement, pour sensibiliser.
Force est de constater qu’il fut difficile — voire parfois impossible — de convaincre politiques et sociétés civiles pour une raison toute simple : lorsque l’autre refuse de vous entendre, de vous écouter, parce qu’il s’en tient à sa «vérité», vous n’avez aucune chance de venir à bout de sa mauvaise foi. Nous avons eu des soutiens certes, comme ceux de Madame Simone Veil, du défunt Stéphane Hessel, Jean-Pierre Chevènement, Harm Botje (journaliste hollandais qui, après avoir séjourné en Algérie, écrivait : «L’Etat fonctionne normalement») ; Ono Kyoto de nationalité japonaise, Bois Piqué Monserrat, journaliste espagnole. Mais leurs voix et leurs écrits furent souvent couverts par la mauvaise foi des autres.
Et il n’y a pas eu que le 22 mars 1993 où nous fûmes dans la solitude. Seuls et incompris. Incompris non pas au sens «ils n’ont pas compris» mais au sens «ils refusent de comprendre». Je me souviens le 2 novembre 1994, avoir rencontré Bernard Kouchner (en raison d’une amie commune) lors d’un de mes passages à Paris. La discussion porte bien évidemment sur l’Algérie. J’explique.... je dis.... et je l’entends me répondre : «Toutes ces morts sont regrettables mais que voulez-vous Madame, à la violence des uns répond celle des autres. Parmi les démocrates assassinés beaucoup ont eu le tort de soutenir le coup d’Etat militaire. Le FIS a gagné». Le «champion» de l’humanitaire me signifiait froidement que les victimes algériennes du terrorisme islamiste méritaient de mourir assassinées. Comme l’on dit chez nous «chah fihoum» (c’est bien fait). Je maîtrise ma colère parce que je refuse de faire dans l’émotionnel. Je rétorque : «M. Kouchner, vous êtes libre de penser que le totalitarisme prend le nom de «démocratie» lorsqu’il s’agit de mon pays. Mais sachez que l’Algérie ne sombrera pas et un jour viendra où vous serez contraints de changer d’opinion car le terrorisme n’a pas de frontières». Lorsque je l’ai vu à la télévision participer à la marche du 11 janvier 2015 à Paris, je me suis juste demandée ce qu’il me dirait aujourd’hui si je le rencontrais. Mais je ne le rencontrerai plus car le 2 novembre 1994 est un souvenir douloureux.
8 décembre 1994. Andrée Michel, une amie du Parti socialiste depuis de longues années, m’invite à faire une intervention à Aubervilliers (Paris) sur «la situation des femmes en Algérie». Les mines défaites de Henrie Emmanuelli et de Gérard Foulques (du bureau politique du PS) présents à la conférence me renseignent sur les véritables intentions des organisateurs du PS ce soir-là. Je parle de la résistance de femmes, de femmes égorgées, kidnappées, violées, l’on attendait de moi la validation de la thèse : aucune différence entre la barbarie islamiste et ceux qui la combattaient.
Mais pourquoi donc l’Europe n’a-t-elle pas voulu voir la logique des destructions et de nihilisme des islamistes, leur haine, leur xénophobie aveugle et sourde?
Pourquoi donc l’Europe a-t-elle attendu d’être touchée pour enfin comprendre que notre combat contre le terrorisme islamiste était juste ?
Pourquoi l’Etat d’urgence est-il normal en Europe et fut décrié hier en Algérie, qualifié de violation aux droits de l’Homme par cette même Europe ?
Je me souviens également de Bruxelles en février 1995. La Belgique offrait en ce temps-là aux islamistes le statut de réfugiés et les accueillait à bras ouverts. Février 1995 donc, juste après le terrible attentat du Bd Amirouche, le 30 janvier 1995. Je me trouve au Centre de presse international à Bruxelles pour une conférence-débat sur l’Algérie.
Aucun des intervenants lors de ce débat n’évoque l’horreur du Bd Amirouche. Journalistes belges politiques et autres reparlent de l’arrêt du processus électoral, de «guerre civile»... Amina Bouabdallah 20 ans, Souad Mahdi 20 ans, Rachid Djoudi 21 ans, Zakia Bouhired 20 ans, Hakim Boughti 20 ans, fauchés par la bombe n’intéressent personne et surtout pas la presse belge, plus compatissante à l’égard des assassins. Des jeunes Algériennes, des jeunes Algériens déchiquetés par ceux qui n’eurent pas besoin du mobile : «Arrêt du processus électoral interrompu» pour sortir leurs bombes, leurs kalachnikovs, leurs couteaux. En 1981, en 1985 — bien avant les législatives de 1991 - n’avaient-ils déjà pas pris les armes contre la République ? A Bruxelles, le journal belge Le Soir ne dit pas «Je suis les victimes du Bd Amirouche». Non, il reprend la déclaration du sinistre Anouar Haddam «La cible était le commissariat situé au Bd Amirouche. Au même moment un bus transportant des civils passait par là». Il était en ce temps-là bien au chaud aux USA. De sa prison en Virginie quelques années plus tard, il tentera de nier cette déclaration en accusant la presse nationale d’avoir déformé son propos.
Sauf qu’il «oublia» de dire que le Financial Times reproduisit sa déclaration belge le 04/02/1995. Toujours en février 1995 à Bruxelles, le journaliste Abdelouahab Habbat organise dans la capitale belge une exposition de photographies qu’il a intitulée : «Barbarie plurielle» qu’il présente comme un hommage à toutes les victimes du terrorisme islamiste. Lors d’une conférence de presse, il déclare que des agences l’ont censuré au motif que les photographies étaient horribles.
Le silence, l’injustice faite à ces victimes, la mauvaise foi, ne sont-elles pas plus abominables ?
Lors de ce séjour belge, je suis informée par un ami que le secrétaire général du Parti socialiste, M. Gaudin veut me rencontrer (février 1995).
C’est lui qui a souhaité cette rencontre, mais je le sens sur la défensive, voire un tantinet agressif. M’écoute-t-il ?
Je ne peux en être sûre. Il plaide tel un procureur qui requiert des années de réclusion contre un assassin pour la plate-forme de Sant’Egidio. «Pourquoi le camp des éradicateurs a-t-il rejeté cette solution de paix ? Le terrorisme est une opposition qui n’a aucune autre solution pour s’exprimer». Je me lève. Je n’ai plus rien à dire à M. Gaudin. Etonné par ma réaction et se voulant paternaliste, il me dit : «Que pouvons-nous faire pour aider les démocrates ? L’occasion pour moi est inespérée. «Vous taire seulement». Je n’attends pas qu’il m’accompagne à la porte de sortie. Gaudin ne fut pas un cas isolé. Je peux citer aussi Pierre Mauroy (maire de Lille décédé) en 1997.
En cette année 1995, la mauvaise foi est d’autant plus tenace qu’il y a une volonté socialiste française d’internationaliser la «crise algérienne» (ainsi appelée par les socialistes).
L’ex-Président François Mitterrand (décédé) après avoir déclaré au lendemain du 26 décembre 1991 (législatives) «les urnes ont parlé» propose, le 3 février 1995, une conférence politique en Europe inspirée de la plateforme de Rome «comme solution politique à la crise algérienne». Inutile de rappeler que F. Mitterrand fut ministre de l’Intérieur en 1957 et ministre de la Justice, garde des Sceaux durant la même période. Inutile car Algériens et Français le savent. Tout comme ils n’ignorent pas que le défenseur de l’abolition de la peine de mort que fut le même Mitterrand pour des raisons purement électoralistes en 1981, se prononça, sans état d’âme, pour l’exécution des premiers condamnés à mort algériens au Conseil des ministres du mercredi 15 février 1956. Voici ce que nous relatent les historiens Benjamin Stora et François Malye : «François Mitterrand et la guerre d’Algérie» page 34 :
«Au moment du vote :
- Gaston Deferre, contre
- Pierre-Mendès France, contre également
- Alain-Savary, contre
- Maurice-Bourges Maunoury : pour
- François Mitterrand, pour.
La proposition d’internationaliser «la crise» ne manquait pas de relais : journalistes de Libération, Libre-Belgique, El Pais, El Hayat à Londres, les «humanistes», les «experts» en ceci, en cela...
Sans oublier des «chercheurs» du CNRS comme François Burgat qui écrivit : «L’islamisme marque la naissance d’une génération que l’Occident doit analyser autrement que comme une pathologie» (L’islamisme en face, aux éditions La Découverte). «La Découverte» de François Jéze prompt lui aussi à défendre bec et ongles les islamistes jusqu’à ce jour.
Comment oublier le mur d’incompréhension auquel nous nous heurtâmes Mme Saïda Benhabylès et moi-même, lorsque nous demandâmes à rencontrer l’ambassadeur de Belgique, M. Maricou, le 07/04/1997 ? Nous le sollicitâmes de transmettre trois exemplaires d’une lettre adressée au Premier ministre belge, au bourgmestre de la ville de Bruxelles et au ministre de l’Intérieur en signe de protestation à la marche d’éléments de l’ex-FIS prévue le 12 avril 1997 (la veille d’élections législatives en Algérie). Réponse de l’ambassadeur : «Cette marche est pacifique. Nous ne pouvons pas l’annuler au nom de la liberté d’expression». Incroyable mais vrai. La marche a tout de même été annulée grâce aux pressions conjuguées de femmes algériennes et belges. Pourquoi donc ce laxisme ? Pourquoi donc ce laisser-faire ? Jusqu’au point de permettre à une commune belge de se radicaliser et fournir des kamikazes programmés pour semer la mort ce 22 mars 2016 à Bruxelles.
Comment oublier le 20 avril 1997 ? Je suis conviée à un déjeuner organisé par le chargé d’affaires de la République de Hongrie à Alger. L’ex-ambassadeur de Grande-Bretagne en Algérie, M. Gordon, est également invité. L’Algérie est le sujet principal. M. Gordon reproche à la presse de caricaturer les islamistes et d’user de mots comme barbarie : «Il ne faut pas mettre dans le même sac tous les islamistes». Ce à quoi je réponds : «Que Londres peut se vanter de ne pas appartenir au clan des caricaturistes puisque la Grande-Bretagne accueille à bras ouverts les “bons” terroristes qui massacrent les “méchants” républicains». N’est-ce pas en France, à Paris que «Bakioun ala el ahd» (fidèles au serment), organisation islamiste dirigée par des islamistes algériens sous le couvert d’association caritative, eut durant de longues années pignon sur rue ?
Je n’ai pas oublié le débat particulièrement houleux avec un chercheur américain, Aroon Kapil, le 13 juin 1995, dans les studios de Arte (émission «Algérie maintenant»). L’émission devait être diffusée la semaine d’après, elle le fut quinze jours plus tard et à minuit ! Motif ? Jérôme Clément, président de la chaîne, estima regrettable «mon acharnement à monopoliser la parole» ! Que dire de la rencontre en novembre 97 avec la Commission des droits de l’Homme du Parlement européen ?
Les islamistes, leurs défenseurs et Cohn-Bendit demandèrent aux députés de voter une résolution afin que soit dépêchée une commission d’enquête en Algérie. Le syndicaliste au parcours prestigieux, Abdelmadjid Azzi, Mme Fouzia Ababsa, journaliste, se souviennent, certainement comme moi, de la mauvaise foi des «organisateurs» qui nous volèrent vingt minutes sur notre temps de parole ! Au final et grâce à nos efforts de convaincre au moins ceux et celles qui voulurent nous entendre comme la députée Catherine Lalumière (France) et Mme Fischer (Allemagne), les parlementaires n’adoptèrent aucune résolution relative à une commission d’enquête.
Et lorsque le panel onusien se déplaça en juillet 1998, les «auditionnés» dont je fis partie purent constater l’agressivité et la mauvaise foi du président du panel, Mario Soarès, plus islamiste que les islamistes.
Une attitude, fort heureusement, non partagée par les autres membres de la délégation dont Mme Simone Veil.
La mission de la commission était d’informer et non d’enquêter.
Pour quelles raisons ce «coup de foudre» pour le totalitarisme de la part d’une Europe qui eut à combattre le nazisme ? Pourquoi avoir permis à des islamistes délinquants dans une vie antérieure de devenir une menace pour cette même Europe ? Je serais injuste si je m’arrêtais au seul Occident. Mes pseudo-frères et sœurs arabes n’ont pas été en reste. Durant cette période combien douloureuse, dure à vivre et à supporter, le Maroc par la voix de son roi, Hassan II — paix à son âme — nous conseilla au lendemain du 26 décembre de servir de laboratoire pour la région. Silence absolu de la Tunisie, de la Libye (ou ex-Libye ?). Délectation de l’Arabie Saoudite qui encourageait le terrorisme croyant pouvoir mettre sous sa botte l’Algérie.
Autre délectation de la chaîne Al-Jazeera, connue pour sa haine à l’égard de l’Algérie.
Juin 1997. Rencontre à Metz entre femmes arabes sur la situation des femmes. Une Tunisienne, une Palestinienne, une Marocaine et moi-même. Quatre universitaires, quatre femmes sachant en principe ce dont elles parlent.
La première à prendre la parole fut la Palestinienne. Pas un mot de solidarité avec les Algériennes. Sans doute ne voulait-elle pas se souvenir que c’est dans mon pays qu’est né l’Etat palestinien.
La Marocaine et la Tunisienne déclarent péromptoirement que jamais leurs pays ne connaîtront le sort de l’Algérie car le roi et l’ex-président Ben Ali ne laisseront jamais faire. C’est toujours une belle opportunité d’intervenir le dernier. Je rappelai à mes «sœurs» arabes que les Algériens se battaient contre l’obscurantisme au péril de leurs vies pour protéger toute la région. «Si nous tombons vous tomberez avec nous», conclu-ai-je.
Je n’ai que compassion pour les victimes tunisiennes et étrangères de l’attentat du Bardo, mais je ne peux m’empêcher de dire que moi aussi j’aurais voulu que ces «Arabes», si proches géographiquement, fussent, hier, aussi compatissants à notre égard que nous le sommes aujourd’hui avec eux.
J’ai entendu exprimer ces vérités non point au nom d’un sentiment de rancune qui m’animerait mais pour une autre raison plus importante que nos rancœurs. Aujourd’hui, le monde entier — y compris les USA, qui avant septembre 2001 faisaient l’éloge des «bons» islamistes — a compris que seule la solidarité entre Etats, entre peuples aura raison de l’islamisme terroriste.
Car le monde entier a compris que le terrorisme islamiste n’a pas de frontières. Et si j’ai évoqué la magnifique marche du 22 septembre 1993 à Alger, c’est pour dire :
aujourd’hui, marchons ensemble en nous regroupant autour de valeurs communes. L’une d’entre elles et la plus importante étant qu’une victime du terrorisme islamiste n’a pas de nationalité parce qu’elle est victime de la haine et de l’obscurantisme.
Nous rassembler pour défendre le droit à la vie, le droit à la culture, pour défendre la tolérance et le respect de l’autre. L’heure — et c’est urgent — n’est plus de disserter sur les «bons» et les «mauvais» islamistes. L’islamisme est une idéologie qui assassine lorsqu’on n’y adhère pas. L’heure est de faire taire les «puristes» attachés aux mots plutôt qu’aux valeurs. C’est ainsi que nous aurons raison de la bête immonde en nous rassemblant autour de ce qui fait notre force parce que attachés aux mêmes valeurs. La menace est partout et à ce propos, la Suisse ferait mieux de nettoyer ses djihadistes installés comme on le sait depuis l’ère de Mourad Dehina et consorts... Ce serait plus judicieux pour elle de le faire et plus rentable plutôt que de chercher des poux à ceux qui n’en ont pas. Enfin, pour nous autres Algériens, la vigilance est de mise et je ne crois absolument pas ceux qui nous disent que la menace aux frontières n’existe pas ou serait une surenchère. La vigilance est de mise d’autant que si l’appel au meurtre d’un écrivain par un islamiste a été sanctionné par la justice quand bien même la peine est symbolique, d’autres islamistes prennent le relais en s’acharnant contre notre ministre de l’Education nationale, Mme Benghebrit Nouria, accusée de vouloir «franciser l’école». Leur véritable motivation est que l’école qu’ils ont massacrée durant des décennies leur échappe aujourd’hui.
Gageons seulement que madame la ministre, que des générations d’écoliers auraient dû avoir bien avant sa nomination, ne sera pas sacrifiée pour plaire aux islamistes. De par le passé, une ministre de la Formation professionnelle nommée en octobre 1991 fut remplacée par Saïd Guechi, décédé en février 92. On ne lui reprocha pas son incompétence — loin s’en faut. Il lui fallait céder son poste à un islamiste. Elle a pour nom Mme Benameur Anissa. Si je parle de cela ce n’est point pour dévier sur un autre sujet. C’est, au contraire, pour répéter que ce qui nous rassemble avec les autres pays dans la lutte antiterroriste, c’est aussi de protéger l’éducation nationale contre les dérives islamistes dont on connaît les méfaits à l’école.
Cela fait partie des valeurs à défendre qui nous rassemblent et nous ressemblent.

IN LSA 
Leila Aslaoui-Hemmadi est née à Alger en 1945. Elle partage sa vie entre l’écriture, la famille et le sport, une vie bien remplie. Après une longue carrière dans la magistrature, elle a été ministre de la Jeunesse et des Sports (1991-1992) dans le gouvernement de Mohamed Boudiaf, puis ministre de la Solidarité nationale d’avril 1994 jusqu’à sa démission en septembre de la même année, pour protester contre les pourparlers entre le pouvoir algérien et le front islamique du salut, officiellement dissous. Son mari a été assassiné dans son cabinet de chirurgie dentaire par des islamistes le 17 octobre 1994. Elle se bat aujourd’hui pour le respect des droits de la femme en Algérie.

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