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jeudi 2 novembre 2017

Catalogne, l’étrange escapade belge de Carles Puigdemont

Par Hassane Zerrouky
Je voulais écrire sur le Qatar, notamment sur son ex-Premier ministre et homme fort de ce petit émirat, Hamad Bin Jassim, qui faisait peur à tant de régimes durant le «printemps» dit «arabe» et qui, dans un entretien à la TV publique qatarie, vient de cracher le morceau : il a reconnu en effet que le Qatar et l’Arabie Saoudite ont armé Al-Qaïda en Syrie pour renverser le régime de Bachar. Pour ceux que ça intéresse, je leur recommande l’article paru dans l’Humanité de lundi dernier.
Sur la Catalogne, dont l’évolution de la situation nous intéresse de près par ces temps de tentatives de démembrement des Etats-Nations, l’on a envie de dire «tout ça pour ça» ! Le 27 octobre, le Parlement régional catalan proclame l’indépendance. Le jour même Madrid annonce la dissolution de toutes les institutions catalanes – Parlement, gouvernement, présidence de la région… – la mise sous tutelle de la région catalane et annonce des élections régionales pour le 21 décembre. Le 28 octobre, le chef indépendantiste Carles Puigdemont appelle à la «résistance pacifique», avant de disparaître des radars. Le lendemain, 29 octobre, Barcelone est le théâtre d’une démonstration de force des anti-indépendantistes. Une marée humaine : 300 000 manifestants d’après la police, beaucoup plus selon les organisateurs, contre l’indépendance catalane.
C’est dans ce contexte que Carles Puigdemont accompagné de cinq membres de son gouvernement a quitté précipitamment Barcelone pour Bruxelles d’où il s’est exprimé mardi en fin de matinée. Tout en affirmant que le projet d’indépendance était «gelé», il a accepté de se soumettre à la loi espagnole en déclarant être partant pour les élections générales convoquées par le Premier ministre espagnol Mariano Rajoy pour le 21 décembre, assurant qu’il respecterait le résultat des urnes. Tout en se demandant si l’Etat espagnol ferait de même si les forces indépendantistes obtenaient la majorité. Une fois terminé sa conférence de presse, voilà Puigdemont, dit «Playmobil», sabre au clair, qui annonce son «come-back» à Barcelone, prêt à affronter la justice qui le menace de plusieurs années de prison pour «rébellion»… pour finalement rester en Belgique !
Dans ce bras de fer qui est loin d’être fini, le Premier ministre espagnol a fait montre d’une certaine habileté. Non seulement, il n’a pas eu besoin d’user de la force pour s’assurer du contrôle de la région catalane, mais il n’a pas dissous les médias indépendantistes ni révoqué les dizaines de milliers de fonctionnaires de la Generalitat (Parlement et institutions catalanes).
La facilité avec laquelle Mariano Rajoy a mis sous tutelle la Catalogne est-elle due au fait que le «processus d'indépendance (...) est parti de l'illusion que ce serait un processus facile, qui pourrait se conduire rapidement et sans dommages» comme l’a reconnu hier Santi Vila, ancien responsable des entreprises dans le gouvernement Puigdemont, sur la radio régionale Rac1. «Où est le ministère des Finances qui devait être institué ? Où est l'agence de sécurité sociale qui devait être créée ? Où est le contrôle du territoire, le contrôle des ports, des aéroports ?» s'est-il demandé dépité. Constat d’échec ? A voir !
Si pour l’heure le gouvernement conservateur espagnol a remporté la première manche, la question catalane est loin d’être résolue. Elle divise plus que jamais les Catalans. Toujours est-il qu’à deux mois des élections, c’est l’incertitude. Un premier sondage publié par Il Mundo donnait une légère avance pour les partisans du maintien de la Catalogne au sein de l’Espagne, 43,4%, contre 42,5% pour les partis indépendantistes dont celui de la droite nationaliste, le PDeCAT, de Carles Puigdemont. Un second sondage réalisé par l'Institut du gouvernement catalan du 16 au 29 octobre indique que les partisans de l'indépendance de la Catalogne (48,7%) sont en revanche plus nombreux que ses opposants (43,6%). D’ici le 21 décembre tout peut donc basculer dans un sens ou un autre.
Et si l’intervention de Carles Puigdemont à Bruxelles peut faire pencher la balance en faveur de l’indépendance catalane, en revanche, c’est le moins qu’on puisse dire, son escapade belge, qui a quelque peu pris de court et désarçonné de nombreux partisans de l’indépendance, peut tout aussi bien jouer en sa défaveur. A suivre… et bonne fête nationale à tous.
H. Z.in LSA

hzerrouky@hotmail.com

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