Par Ahmed Halli
halliahmed@hotmail.com
Deux évènements, deux informations en relation avec ces évènements, et qui donnent à réfléchir. Mardi 26 juillet, le curé de l'église de Saint-Etienne-du-Rouvray en Normandie est égorgé par deux jeunes terroristes français musulmans, repérés comme potentiellement dangereux, mais… On apprend ensuite que la paroisse où officiait la victime a fait don d'un terrain lui appartenant pour permettre aux musulmans de la ville de bâtir leur mosquée. De là à imaginer que c'est dans cette mosquée que les deux terroristes ont fourbi leurs armes, si j'ose dire. Les deux tueurs n'ont sans doute pas violé les lois universelles de l'hospitalité puisqu'ils étaient chez eux, mais ils ont au minimum «trahi le sel», comme on dit chez nous. Envers du décor : vendredi 22 juillet 2016, à Minieh en Haute-Égypte, après la prière collective des fidèles musulmans s'en prennent à des édifices coptes, incendiant notamment une église en chantier. Il y a longtemps que le vendredi n'est plus le jour propice à la spiritualité, et au rapprochement avec Dieu, mais se décline en jour de colère, et de violence, dans les pays arabes. Il suffit d'une étincelle pour mettre le feu aux poudres, et la mise à feu provient systématiquement du sermon d'un imam survolté qui pousse ses ouailles jusqu'à l'incandescence.
Le prétexte à ces débordements d'intolérance et de haine est presque toujours le même : l'édification d'une église qui exige pour être autorisée la signature du chef de l'Etat, lui-même. Minieh où se trouve la plus grande concentration chrétienne en «terre d'Islam», compte environ 5 000 mosquées et zaouïas contre quelque 600 églises, relève un confrère égyptien. Minieh, c'est aussi la citadelle de l'islam politique, là où le Président déchu Mohamed Morsi avait obtenu près de 80% des voix aux élections de 2012. Entre deux incidents de ce type, on trouve aussi des histoires d'amour et/ou d'adultère, impliquant des membres des deux communautés : une musulmane s'enfuit avec un Copte, et l'honneur de la religion bafouée crie vengeance. Il arrive aussi qu'une Copte se laisse séduire par un jeune musulman, déclenchant la liesse des siens, et ravivant l'inquiétude de la minorité chrétienne, yeux rivés sur les données démographiques. Le même confrère a noté que dans le seul gouvernorat de Minieh, on a enregistré depuis 2011 deux à trois incidents par mois, le plus souvent déclenchés par une simple rumeur, les minbars faisant le reste. Les Coptes avaient toutes les autorisations nécessaires pour construire leur église, en toute légalité, mais une foule chauffée à blanc ne sait plus discerner ni lire.
Les violences confessionnelles, le plus souvent à l'initiative de la communauté musulmane, sont trop fréquentes pour être niées, mais les élites égyptiennes les traitent comme une maladie honteuse qu'il faut soigner, mais en toute discrétion. Il y en a même qui posent les mauvaises questions, questions rafiots, comme celle de l'écrivain islamiste, Fahmi Howeidi : «Qui l'a fait, et pourquoi ?». C'est dans le quotidien saoudien Al-Charq-al-awsat, et la question est d'un musulman, politiquement engagé, qui s'empresse d'enterrer le problème sous un point d'interrogation renvoyant dos à dos agresseurs et agressés. Pour mémoire, Fahmi Howeidi est venu en Algérie, comme hôte du FIS, pour y saluer le proche avènement de la République islamique. Un autre élément que le chroniqueur, trop occupé à laver les mains sanglantes de ses coreligionnaires et concitoyens, n'a pas pris en considération, l'existence d'une fatwa justificative. Les fanatiques du vendredi n'obéissent pas aux lois d'Égypte fussent-elles inspirées de la charia, mais ils sont soumis aux injonctions de l'imam, et de ses édits religieux. En plus des rigueurs du parcours administratif, les Coptes ont contre eux une fatwa, très répandue en Égypte, selon laquelle la construction d'édifices religieux, autres que les mosquées, est interdite en terre d'Islam.
Fort heureusement, l'amnésie ne s'est pas emparée de tous les Arabes, et le religieux et lecteur de Cora syrien, Mohamed Habache, a publié opportunément la semaine dernière le texte de la fatwa d'origine contrôlée. La fatwa que publie le magazine libanais Shaffaf est signée du cheikh Abdelaziz Benabdallah, mufti du royaume d'Arabie Saoudite, et de plusieurs «grands ulémas». Elle porte le numéro 1328, et elle date de l'an 1421 de l'hégire, ce qui correspond à l'année 2000 dans le calendrier grégorien, et elle est toujours présente sur le site officiel, précise Mohamed Habache. La fatwa en dit long sur les véritables projets de l'Arabie Saoudite qui ne se prive pas, par ailleurs, de financer la construction de mosquées en terre chrétienne, où l'on enseigne les mêmes rudiments. Voici quelques extraits : «Toute religion autre que l'Islam est mécréance, et égarement, et tout lieu de culte autre que celui voué à la religion musulmane est une maison de mécréance, et d'égarement. Celui qui croit que les églises sont des maisons de Dieu, qu'on y adore Dieu, et qui aide à leur ouverture, et à la pratique des rites, est un apostat.» Appréciez la différence entre le comportement de la paroisse de Saint-Étienne-du-Rouvray, et le discours du mufti wahhabite, et des «Grands ulémas» saoudiens. La fatwa concerne normalement la presqu'île arabe, mais son application va bien au-delà du royaume saoudien.
Mohamed Habache souligne que cette fatwa ne justifie sans doute pas le geste démentiel des terroristes français, mais elle nivelle certainement le terrain à un extrémisme identique.
Plus éloquent encore est ce sondage réalisé par le site Elaph, après les incidents de Minieh, et posant la question de savoir qui a provoqué les violences. L'église copte arrive en tête avec 43,37% des réponses, suivie par les forces de sécurité, 29,76%. Les vrais responsables de la haine confessionnelle arrivent bons derniers avec 12,96%, ce qui montre l'étendue du chemin qui reste à parcourir.
A. H. IN LSA
halliahmed@hotmail.com
Deux évènements, deux informations en relation avec ces évènements, et qui donnent à réfléchir. Mardi 26 juillet, le curé de l'église de Saint-Etienne-du-Rouvray en Normandie est égorgé par deux jeunes terroristes français musulmans, repérés comme potentiellement dangereux, mais… On apprend ensuite que la paroisse où officiait la victime a fait don d'un terrain lui appartenant pour permettre aux musulmans de la ville de bâtir leur mosquée. De là à imaginer que c'est dans cette mosquée que les deux terroristes ont fourbi leurs armes, si j'ose dire. Les deux tueurs n'ont sans doute pas violé les lois universelles de l'hospitalité puisqu'ils étaient chez eux, mais ils ont au minimum «trahi le sel», comme on dit chez nous. Envers du décor : vendredi 22 juillet 2016, à Minieh en Haute-Égypte, après la prière collective des fidèles musulmans s'en prennent à des édifices coptes, incendiant notamment une église en chantier. Il y a longtemps que le vendredi n'est plus le jour propice à la spiritualité, et au rapprochement avec Dieu, mais se décline en jour de colère, et de violence, dans les pays arabes. Il suffit d'une étincelle pour mettre le feu aux poudres, et la mise à feu provient systématiquement du sermon d'un imam survolté qui pousse ses ouailles jusqu'à l'incandescence.
Le prétexte à ces débordements d'intolérance et de haine est presque toujours le même : l'édification d'une église qui exige pour être autorisée la signature du chef de l'Etat, lui-même. Minieh où se trouve la plus grande concentration chrétienne en «terre d'Islam», compte environ 5 000 mosquées et zaouïas contre quelque 600 églises, relève un confrère égyptien. Minieh, c'est aussi la citadelle de l'islam politique, là où le Président déchu Mohamed Morsi avait obtenu près de 80% des voix aux élections de 2012. Entre deux incidents de ce type, on trouve aussi des histoires d'amour et/ou d'adultère, impliquant des membres des deux communautés : une musulmane s'enfuit avec un Copte, et l'honneur de la religion bafouée crie vengeance. Il arrive aussi qu'une Copte se laisse séduire par un jeune musulman, déclenchant la liesse des siens, et ravivant l'inquiétude de la minorité chrétienne, yeux rivés sur les données démographiques. Le même confrère a noté que dans le seul gouvernorat de Minieh, on a enregistré depuis 2011 deux à trois incidents par mois, le plus souvent déclenchés par une simple rumeur, les minbars faisant le reste. Les Coptes avaient toutes les autorisations nécessaires pour construire leur église, en toute légalité, mais une foule chauffée à blanc ne sait plus discerner ni lire.
Les violences confessionnelles, le plus souvent à l'initiative de la communauté musulmane, sont trop fréquentes pour être niées, mais les élites égyptiennes les traitent comme une maladie honteuse qu'il faut soigner, mais en toute discrétion. Il y en a même qui posent les mauvaises questions, questions rafiots, comme celle de l'écrivain islamiste, Fahmi Howeidi : «Qui l'a fait, et pourquoi ?». C'est dans le quotidien saoudien Al-Charq-al-awsat, et la question est d'un musulman, politiquement engagé, qui s'empresse d'enterrer le problème sous un point d'interrogation renvoyant dos à dos agresseurs et agressés. Pour mémoire, Fahmi Howeidi est venu en Algérie, comme hôte du FIS, pour y saluer le proche avènement de la République islamique. Un autre élément que le chroniqueur, trop occupé à laver les mains sanglantes de ses coreligionnaires et concitoyens, n'a pas pris en considération, l'existence d'une fatwa justificative. Les fanatiques du vendredi n'obéissent pas aux lois d'Égypte fussent-elles inspirées de la charia, mais ils sont soumis aux injonctions de l'imam, et de ses édits religieux. En plus des rigueurs du parcours administratif, les Coptes ont contre eux une fatwa, très répandue en Égypte, selon laquelle la construction d'édifices religieux, autres que les mosquées, est interdite en terre d'Islam.
Fort heureusement, l'amnésie ne s'est pas emparée de tous les Arabes, et le religieux et lecteur de Cora syrien, Mohamed Habache, a publié opportunément la semaine dernière le texte de la fatwa d'origine contrôlée. La fatwa que publie le magazine libanais Shaffaf est signée du cheikh Abdelaziz Benabdallah, mufti du royaume d'Arabie Saoudite, et de plusieurs «grands ulémas». Elle porte le numéro 1328, et elle date de l'an 1421 de l'hégire, ce qui correspond à l'année 2000 dans le calendrier grégorien, et elle est toujours présente sur le site officiel, précise Mohamed Habache. La fatwa en dit long sur les véritables projets de l'Arabie Saoudite qui ne se prive pas, par ailleurs, de financer la construction de mosquées en terre chrétienne, où l'on enseigne les mêmes rudiments. Voici quelques extraits : «Toute religion autre que l'Islam est mécréance, et égarement, et tout lieu de culte autre que celui voué à la religion musulmane est une maison de mécréance, et d'égarement. Celui qui croit que les églises sont des maisons de Dieu, qu'on y adore Dieu, et qui aide à leur ouverture, et à la pratique des rites, est un apostat.» Appréciez la différence entre le comportement de la paroisse de Saint-Étienne-du-Rouvray, et le discours du mufti wahhabite, et des «Grands ulémas» saoudiens. La fatwa concerne normalement la presqu'île arabe, mais son application va bien au-delà du royaume saoudien.
Mohamed Habache souligne que cette fatwa ne justifie sans doute pas le geste démentiel des terroristes français, mais elle nivelle certainement le terrain à un extrémisme identique.
Plus éloquent encore est ce sondage réalisé par le site Elaph, après les incidents de Minieh, et posant la question de savoir qui a provoqué les violences. L'église copte arrive en tête avec 43,37% des réponses, suivie par les forces de sécurité, 29,76%. Les vrais responsables de la haine confessionnelle arrivent bons derniers avec 12,96%, ce qui montre l'étendue du chemin qui reste à parcourir.
A. H. IN LSA
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