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jeudi 7 avril 2016

Mohamed Larbi Ben M’hidi L’homme qui a fait trembler l’état-major français

De g. à dr. : Amar Ouamrane, Krim Belkacem, Larbi Ben M’hidi, Abane Ramdane , Zighoud Youcef
De g. à dr. : Amar Ouamrane, Krim Belkacem, Larbi Ben M’hidi, Abane Ramdane , Zighoud Youcef
Mohamed-Larbi Ben M’hidi est né en 1923 au village El Kouahi, près d’Aïn M’lila, dans la wilaya d’Oum El Bouaghi, au sein d’une riche famille d’agriculteurs. Dès l’âge de 6 ans, il est inscrit à l’école primaire de son village natal qu’il quittera une année plus tard pour poursuivre ses études à Batna jusqu’à l’obtention du certificat de fin d’études primaires élémentaires en 1936. En 1939, il entame des études secondaires à Biskra, mais c’est aussi dans la capitale des Ziban qu’il fait son entrée dans la grande école qu’est l’organisation des Scouts musulmans algériens (SMA) au sein de laquelle il deviendra chef de groupe. L’autre école qui nourrira son patriotisme est l’équipe de football de l’US Biskra, avant de se découvrir une autre vocation : le théâtre. C’est également dans la même ville qu’il travaille pour la première fois dans l’administration en qualité de comptable au service du Génie civil. En 1943, il s’installe à Constantine où il se rapproche de l’Association des oulémas, une période qui l’a grandement marqué. Devenu adulte accompli, Larbi Ben M’hidi fait ses premiers pas dans le militantisme politique en adhérant au mouvement des Amis du Manifeste et de la Liberté (AML) créé par Ferhat Abbas le 14 mars 1944, participera au congrès qui s’est tenu en 1945, et, par la suite, adhèrera au Parti du peuple algérien (PPA), qui revendiquait l’indépendance de l’Algérie.

Lors des manifestations du 8 mai 1945, il est bouleversé par les massacres commis par l’armée française à Sétif, Kherrata et Guelma. Le lendemain, Ben M’hidi est arrêté à Biskra à la suite des manifestations de la veille puis incarcéré à la prison du Coudiat de Constantine durant quatre mois. Ces événements l’ont grandement motivé dans son action, ce qui l’a contraint à des activités politiques clandestines au sein du Mouvement pour le triomphe des libertés démocratiques (MTLD) et de l’Organisation spéciale (OS). En avril 1954, il fonde, en compagnie de Hocine Aït Ahmed, Ahmed Ben Bella, Krim Belkacem, Mostefa Ben Boulaïd, Rabah Bitat, Mohamed Boudiaf, Mourad Didouche et Mohamed Khider, le Comité  révolutionnaire d’unité et d’action (CRUA), duquel découlera, le 10 octobre 1954, le Front de libération nationale (FLN), qui sera à l’origine du choix de la date du 1ernovembre 1954 pour le déclenchement de la lutte armée qui aboutira à l’indépendance de l’Algérie le 5 juillet 1962. Au début de la révolution, il prendra la tête de la zone V (région de l’Oranie) et sera chargé de son organisation tant au plan militaire que logistique. Lancée à sa recherche, la police française ne parviendra pas à le localiser, ce qui lui valut le surnom de «l’homme aux vingt visages».
En 1956, il quitte le commandement de la Wilaya V, qui sera alors confié à Abdelhafid Boussouf, pour être désigné en qualité de membre du Conseil national de la révolution algérienne (CNRA). Il se rend à Alger où il rencontre Ramdane Abane, avec lequel il partagera tous les points de vue sur les actions politiques et militaires à entreprendre. Cette entente est scellée au moment de se rendre au Congrès de la Soummam, le 20 août 1956, au cours duquel l’appui de Ben M’hidi à Abane sera déterminant. Le Congrès se réunit à Ifri-Ighzer Amokrane, sur la rive gauche de la Soummam, à quelques kilomètres d’Akbou. Le procès-verbal de la première séance donne la liste des présents. Mohamed-Larbi Ben M’hidi, représentant de l’Oranie, président de séance, Ramdane Abane, représentant le FLN, secrétaire de séance, Amar Ouamrane, représentant de l’Algérois, Belkacem Krim, représentant de la Kabylie, Youcef  Zighoud, représentant du Nord-Constantinois. Lors des travaux, Ben M’hidi est désigné à l’unanimité des voix président de la réunion et est élevé au grade de colonel, membre du Comité de coordination et d’exécution (CCE) et responsable de la Zone autonome d’Alger (ZAA). Le retentissant succès enregistré par le Congrès de la Soummam est à porter au compte du duo qu’il formait avec Ramdane Abane.
Plébiscités par le congrès d’Ifri, les membres du CCE, Ben M’hidi, Abane, Krim, Dahleb et Benkhedda, avaient décidé de siéger dans la Casbah d’Alger où ils pensaient avoir une plus grande emprise sur les militants du FLN, de meilleures liaisons et surtout parce qu’ils étaient persuadés que la capitale était propice à la clandestinité totale, avec ses «planques» et «caches» multiples, ses nombreux agents de liaison perdus dans la masse et les protections de toutes sortes dont ils pourraient bénéficier. Et puis siéger à Alger, c’était aussi être au cœur de l’Algérie et y appliquer la guérilla urbaine, aussi importante à leurs yeux que les combats et les actions dans les maquis.
Une fois réunis, les tâches de chacun d’entre eux sont réparties. Ben M’hidi est désigné responsable de l’action armée, Benkhedda est chargé des contacts avec les Européens et la direction de la Zone autonome d’Alger, Dahleb s’occupera de la propagande et du journal El Moudjahid, Krim est chargé des liaisons avec toutes les Wilayas et, enfin, Abane, responsable politique et financier.
La branche armée prenait en charge l’organisation des «maquis urbains» composés de  groupes qui avaient pour mission de porter des coups aux forces militaires françaises.
L’état-major était sous la responsabilité de Ben M’hidi (El Hakim) avec son adjoint Yacef Saâdi (Djaâfar, Réda Lee), Haffaf Arezki (Houd) et Amar Ali dit la Pointe comme adjoint de Yacef Saâdi.
La Zone autonome d’Alger était composée de trois régions :
- région I : Abderrahmane Arbadji avec pour adjoint Othmane Hadji (Ramel) ;
- région II : Abderahmane Adder (Si Hammoud), adjoint Ahcène Ghandriche (Zerrouk) ;
- région III : Omar Bencharif (Hadj Omar), adjoint Boualem Benabderrahmane (Abaza).
Dès ses débuts en tant que responsable de l’action armée au sein de la ZAA, Ben M’hidi œuvra à la consolidation des groupes de patriotes et à l’organisation du réseau «bombes» appelé à commettre les premiers attentats et fut, entre autres, l’un des principaux initiateurs de la «grève générale de huit jours» en janvier 1957. Commence alors une véritable chasse à l’homme dans Alger, quadrillée par des milliers de parachutistes.
Les 14 et 15 janvier, la Casbah  est investie par plusieurs centaines d’hommes du général Massu. A la suite d’informations transmises par des indicateurs, le refuge qui abritait Yacef Saâdi, son neveu et agent de liaison (P’tit Omar), douze ans, Debbih Chérif, Amar Ali (Ali la Pointe) et Larbi Ben M’hidi, est découvert mais ces derniers ont quitté les lieux pour une autre cache dans les labyrinthes de la Casbah.  Malheureusement, le 23 février 1957, Larbi Ben M’hidi est arrêté par les hommes de Bigeard dans un appartement du centre d’Alger où il se trouvait de passage. Il sera transféré au cantonnement du 3e RPC pour être mis à la disposition des services de renseignements de la 10e région militaire d’Alger. C’est là qu’il retrouve Brahim Chergui, responsable politique de la Zone autonome d’Alger, interpellé le 24 février. Les deux leaders sont interrogés longuement et brutalement, soumis à d’horribles tortures, mais n’avouent  rien. Larbi Ben Mhidi sera exécuté dans la nuit du 3 au 4 mars 1957.
Plusieurs versions de sa mort ont circulé. Selon le général Aussaresses, ce sont lui et ses hommes qui l’ont conduit dans une ferme désaffectée de la Mitidja où ils l’ont pendu les yeux bandés. Le 6 mars, le porte-parole de Robert Lacoste déclare dans une conférence de presse que Ben M’hidi s’est suicidé dans sa cellule en se pendant à l’aide des lambeaux de sa chemise, alors qu’une autre version des faits nous apprend que le 3 mars Ben M’hidi a été emmené à Maison-Carrée (El-Harrach) où, après avoir encore été torturé, il sera exécuté par balles au cours de la nuit après avoir donné une leçon d’héroïsme et d’endurance à ses bourreaux.
La bravoure du leader du FLN a non seulement impressionné ses amis, mais aussi ses ennemis, à commencer par les généraux Bigeard, Massu, Godard et Allaire. A sa mort, Mohamed-Larbi Ben M’hidi avait 34 ans. Il repose aujourd’hui au carré des martyrs d’El Alia.

A SUIVRE... (SOUVENIRS EN RAFALE (DRIFA BEN M'HIDI)

Abderrachid Mefti IN MEMORIA.DZ

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