APS - ALGÉRIE

mardi 4 juillet 2017

INDUSTRIE AUTOMOBILE Vers une redistribution des cartes

Il aura fallu un changement de gouvernement pour que les appréhensions de la presse et les inquiétudes différemment exprimées par l’opinion publique sur la pertinence de l’option de l’industrie automobile en Algérie soient enfin prises en compte par l’exécutif.
Et c’est le nouveau ministre de l’Industrie, Bedda Mahjoub qui, en l’espace de 48 heures, a tiré par deux fois la sonnette d’alarme sur la situation actuelle d’un secteur qui suscite à la fois de l’intérêt et des interrogations.
Sans prendre de gants, il dénonce en effet une stratégie qui est loin de répondre aux attentes des uns et des autres. Pour lui, «la première évaluation faite par mon secteur concernant la construction automobile fait ressortir que nous sommes loin des objectifs tracés. Telle qu’elle est conçue, cette démarche s’est révélée de l’importation déguisée». Pas moins.

Poussant encore plus loin son analyse, il dira que les projets initiés n’auront pas, en définitive, proposé une alternative acceptable à l’explosion de la facture des importations de véhicules relevée les années précédentes. Il évoquera trois aspects qui renseigneraient, selon lui, sur le fiasco de cette stratégie, les prix qui demeurent «inaccessibles» en dépit des facilitations, des avantages fiscaux et parafiscaux et de l’exonération des taxes consentis par l’Etat au profit des investisseurs, le «manque à gagner pour le Trésor public» et aussi le «peu d’impact en matière de création d’emplois».
Le ministre et avant lui le Premier ministre ont insisté sur la nécessité de stopper «l’hémorragie» et de revoir en profondeur les grandes lignes de la démarche du gouvernement.
On annonce, d’ores et déjà, que le cahier des charges sera reconsidéré et verra sans doute le niveau d’exigence de la part des pouvoirs publics revu à la hausse.
Il est, en effet, important de signaler que la formulation juridique du document actuellement en vigueur, notamment dans ses articles relatifs au taux d’intégration, laisse la porte ouverte à toutes les dérives comme celles qu’on a vécues avec le scandale des véhicules importés presque en l’état alors qu’il sont censés avoir été assemblés dans les immenses installations mises gracieusement à la disposition de certains concessionnaires. Le texte en question stipule que l’investisseur n’est tenu par l’obligation de l’intégration locale qu’à la fin de la troisième année et pour un taux juste de 15% largement couvert par les investissements locaux, les charges de fonctionnement, les emplois créés, les achats locaux, etc. Il pourra ainsi continuer à importer des véhicules à sa guise et en toute légalité jusqu’à 3 ans au moins. Une erreur d’appréciation de la part du gouvernement qui aura coûté très cher au Trésor public.
D’autant que l’attente légitime et attendue d’une baisse des prix des véhicules n’aura été au final qu’une vue de l’esprit, voire une gageure. De mémoire d’Algérien, les prix de véhicules tant du neuf que de l’occasion n’auront jamais connu une telle flambée.
Ce que ne dira pas, en revanche, le ministre de l’Industrie, c’est que la démarche de son prédécesseur ne semble, à l’évidence, nullement répondre à un souci de réorganisation du secteur de l’automobile sur la base de fondements économiques mais plutôt une redistribution des marques en Algérie en les attribuant à de nouveaux acteurs avec des avantages réglementaires et financiers exceptionnels. Une initiative qui s’est accompagnée de dégâts collatéraux énormes à travers la perte de milliers d’emplois et la mise sous le paillasson des clefs de plusieurs entreprises.
Pour l’avenir immédiat, le nouveau responsable du secteur précise qu’«il ne s’agit pas de s’attaquer à certains ou geler l’activité mais nous devons revoir son fonctionnement car nous sommes convaincus de l’importance stratégique de ce secteur dans le développement d’un pays». Il avancera comme priorité d’«encourager et de promouvoir la sous-traitance avec la création de dizaines de start-ups». Une option plus raisonnable et à même de préparer une véritable industrie automobile en Algérie.
De son côté, l’Association des constructeurs et des concessionnaires automobiles en Algérie (AC2A) réagit aux déclarations des responsables du gouvernement en «confirmant son support le plus actif aux orientations de développement structurel de l’industrie automobile en Algérie qui ne pourra s’ancrer durablement que par la densification d’un véritable réseau de sous-traitance industrielle accompagné d’un transfert de technologie et d’une politique de formation continue».
Son président, Sefiane Hasnaoui, rappelle, dans un communiqué, que «l’AC2A a toujours souligné que le développement industriel de la pièce de rechange et des composants automobiles est une étape prioritaire dans le développement de l’industrie automobile (…) L’implication des PME et PMI est une approche nécessaire pour s’assurer un succès durable».
B. Bellil IN LSA

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Qu’en pensez vous?